Musées : à l'Ouest du nouveau

Vue aérienne Square-Jardin, Cité des imaginaires © HISM-Neutelings Riedijk

Dossier réalisé par Patrick Thibault  Publié dans le magazine Kostar n°95 - avril-juin 2025

Les bonnes nouvelles sont rares dans le domaine culturel. La baisse des budgets annonce des lendemains qui déchantent. Pourtant, le Grand Ouest affiche un impressionnant programme de nouveaux musées. Construction ou restauration, ça bouge à l’Ouest.

Après la réouverture très réussie du Musée Dobrée par le Département de Loire-Atlantique, on attend – toujours à Nantes – La Cité des Imaginaires - grand Musée Jules Verne et la rénovation complète du Muséum d’Histoire Naturelle.  La Bretagne frappe fort avec L’Hydro – Musée maritime de Saint-Malo, le Musée de Préhistoire à Carnac, le nouveau Musée des beaux-arts à Vannes ou encore le Musée Sérusier à Châteauneuf-du-Faou !  En Vendée, aux Sables d’Olonne, le MASC – Musée de l’Abbaye Sainte-Croix s’apprête à renaître dans un nouvel écrin.  Des équipements qui s’inscrivent dans une démarche environnementale forte. Ils s’affichent vertueux en termes de développement durable et de sobriété énergétique. Ils se veulent ouverts au plus grand nombre.  Kostar fait donc le tour des projets. Une petite visite qui nous plonge dans un futur pas si lointain.  

Cité des Imaginaires

© HISM-Neutelings Riedijk

Entre le Jardin Extraordinaire et la Loire, Nantes donnera à Jules Verne un musée à la hauteur de l’écrivain français le plus traduit au monde. La Cité des Imaginaires-Grand Musée Jules Verne sera consacrée à l’œuvre, et non à l’homme, pour la projeter dans le XXIe siècle. 

La future Cité des Imaginaires accueillera aussi une agora, une médiathèque, un espace d’expos temporaires, bar et restaurant en rooftop pour devenir un lieu majeur de la vie nantaise. Dans l’ancien bâtiment des Grands Moulins de la Loire, le premier d’envergure construit en béton armé par Hennebique en 1895, le regard sera tourné vers l’horizon. L’Agence internationale Neutelings Riedijk Architects (auteure du Musée Aan de Stroom à Anvers), associée à la Nantaise ARS, a dévoilé la nouvelle silhouette du bâtiment. Si on a toujours la transparence sur les trois premiers niveaux, on aura au sommet le niveau ciel conçu à partir de panneaux d’acier recyclé inox qui réfléchira les couleurs du… ciel. La nature va entourer la Cité mais elle est aussi présente via un jardin intérieur et un rooftof arboré. Confiée à l’agence Scénorama, la scénographie des 1 000 m2 du Musée Jules Verne entend créer une illusion d’île volante.  

Budget estimé à 50 M€.

Ouverture prévue fin 2028.

Muséum d’Histoire Naturelle

Coupe Générale © Moatti & Rivière

Avec près de 200 000 visiteurs annuels, le Muséum d’Histoire Naturelle de Nantes est victime de son succès. Sa restauration conservera l’esprit Muséum tout en le projetant au cœur des défis liés à l’environnement. La réhabilitation est assurée par l’agence Moatti & Rivière. 

Au nouveau Muséum, la surface ouverte au public va quasi doubler, passant de 2200 à 4000 m2. Pour autant, pas d’ajout de bâtiments contemporains en extérieur. L’intelligence du projet architectural consiste à surmonter l’ancien Hôtel de la Monnaie (bâtiment Voltaire) et l'actuelle cour intérieure (inaccessible au public) d’une grande toiture vitrée qui retombera sur la façade Voltaire. Ouvert sur la ville, le Muséum retrouvera la lumière naturelle. Dès l’entrée, la Nef (dans l’actuel auditorium) offrira une vue panoramique. L’agora des sciences sera ouverte au public sans droit d’entrée. Un escalier monumental circulaire en bois permettra d’atteindre les niveaux 2 et 3 où commencera la visite. Parmi les références de l’agence Moatti &Rivière, on retrouve la restauration de l’Hôtel de la Marine et le siège du groupe Jean-Paul Gaultier à Paris, le Musée arts décos Borély à Marseille. Sa force consiste à respecter le bâtiment existant pour le transcender. La scénographie conserve donc l’esprit Muséum avec mise en valeur des vitrines d’origine, tout en développant une approche plus libre. Riche de collections exceptionnelles, le Muséum présentera une histoire de la Terre depuis son origine jusqu’à l’anthropocène. « Il s’agit de positionner l’équipement comme acteur majeur d’une société prête à relever les défis liés au climat, à la biodiversité et à la transition écologique pour habiter la Terre demain, tout en contribuant à la diffusion culturelle scientifique et technique. » Avec cette réhabilitation, Nantes est particulièrement fière d’avoir inscrit tous ses musées dans le XXI e siècle.  

Budget estimé à 46 M€.

Ouverture prévue 2029.

L'Hydro

Vue de nuit © Atelier d’Architecture Philippe Prost, ADAGP Paris 2024 / Jeudi Wang

Le Musée maritime de Saint-Malo verra donc le jour intra-muros, dans l’ancienne École nationale supérieure maritime. Le bâtiment, conçu par Louis Arretche et Roger Hummel, sera reconverti par l’architecte Philippe Prost.

Après l’abandon du projet dessiné par l’architecte Kengo Kuma, Saint-Malo rebondit avec L’Hydro. La situation de l’ancienne école d’hydrographie, intra-muros, confère au futur Musée maritime la vue mer ! C’est aussi un bâtiment iconique de la reconstruction qui bénéficie de volumes intéressants et inscrit donc le futur musée dans l’histoire de Saint-Malo, en faisant le trait d’union entre les époques. Parmi les références de Philippe Prost, la Citadelle de Belle-Île-en-Mer, l’Anneau de la Mémoire Notre-Dame-de-Lorette, l’Hôtel de la Monnaie à Paris. Son projet consiste en une mise en valeur de ce patrimoine du XX e siècle, projeté dans le XXI e. Si le projet limite les constructions neuves, il transforme néanmoins radicalement les lieux. Clôtures inspirées par les brise-lames de Saint-Malo, passerelle pour relier les bâtiments, abaissement du sol de la cour pour dégager un café avec vue mer. Percement d’une faille pour créer un accès depuis les remparts. Objectif : « recréer du lien entre la vieille ville, les remparts et la mer ». En lieu et place de la cour minérale actuelle, on aura un jardin de cloître, une forêt miniature de bois de marine et un deck en bois ! Philippe Prost propose de faire de L’Hydro un bateau monde. La scénographie de l’agence Designers Unit offrira au visiteur une traversée dans l’espace et dans le temps, « comme une immersion dans un grand conte maritime ».  

Budget prévisionnel 32,7 M€.

Ouverture prévue fin 2028-2029.

Musée des beaux-arts de Vannes

Nouvelle passerelle, square Fréhaut © Nieto Sobejano

Vannes installe son nouveau Musée des beaux-arts dans le Château de l’Hermine restauré, auquel est ajouté un bâtiment contemporain pour faire le trait d’union entre passé et modernité. C’est l’agence d’architecture espagnole Nieto Sobejano qui a remporté le concours.

Les fouilles archéologiques ont retardé le projet puisque les vestiges sont intégrés au nouveau musée. Les architectes espagnols aux sérieuses références se sont associés au Vannetais Richard Faure. Ils ont imaginé la construction d’un bâtiment neuf, en aluminium recyclé, aux formes géométriques audacieuses qui jouent sur la transparence et le reflet de la ville historique. Le Château de l’Hermine, édifice d’influence néoclassique construit fin XVIII e, sera donc restauré et le parcours muséographique sera conçu sur la double thématique Portraits et Paysages. Un espace sera dédié à Geneviève Asse, Vannetaise. 

Budget prévisionnel 17,5 M€.

Ouverture fin 2027, début 2028.

MASC Les Sables-d'Olonne

© Wilmotte & associés architectes

La station balnéaire des Sables-d’Olonne a la chance de disposer d’un musée pionnier de l’art moderne en France. Un peu vieillissant, il manque de visiteurs. C’est le cabinet Wilmotte qui a remporté la maîtrise d’œuvre du MASC.

Les images parlent d’elles-mêmes. Wilmotte, qui a de solides références (Carrousel du Louvre, Rijksmuseum, Musée d’Orsay…), va faire entrer la modernité à l’Abbaye Sainte-Croix. L’ajout de greffes contemporaines via des façades vitrées va ouvrir le musée sur la ville mais aussi sur le parc à l’arrière, côté Conservatoire, avec l’arrivée d’un restaurant. Prenant en compte la problématique environnementale, la Croisée sera rehaussée pour devenir une véritable agora. Expositions temporaires au rez-de-chaussée et collections permanentes à l’étage.  

Budget estimé à 12 M€.

Ouverture prévue en 2028.

Musée Sérusier

Vue 3D musée © Atelier de l'Île

C’est en juin prochain que Châteauneuf-du-Faou ouvre en son centre un musée consacré à Paul et Marguerite Sérusier. Une initiative qui entend redynamiser la commune rurale. Le projet a été confié à L’Atelier de l’Île.

Paul Sérusier (1864-1927) est un artiste peintre français relié au mouvement des Nabis. Marguerite Sérusier, son épouse (1879-1950), accompagne son mari dans son parcours artistique. Ils sont très liés à Châteauneuf-du-Faou qui leur a servi de décor. Ils y ont vécu et ont été inspirés par le quotidien, les fêtes, les traditions. La commune ayant acquis plus de 200 œuvres au fil du temps a donc décidé d’ouvrir un Musée Sérusier. Au cœur du bourg, il prend place dans trois maisons XIX e et début XX e auxquelles on a ajouté une aile contemporaine. L’agence brestoise Atelier de l’Île architectes (Nouveau Musée de Pont-Aven, Plateau des Capucins, nouvelle scénographie du Musée Bourdelle) est maître d’œuvre. Le musée qui ouvre en juin comprendra un parcours permanent et, chaque année, une expo temporaire.  

Budget 3,5 M€.

Ouverture le 21 juin 2025.

Musée de Préhistoire

© Projectiles / Air Studio

Nouvelle ambition pour Carnac avec la construction d’un Musée de Préhistoire flambant neuf. Un signe architectural fort : un bâtiment urbain, minéral, qui prend de la hauteur, signé de l’agence Projectiles qui n’en est pas à son coup d’essai.

Le Musée du débarquement à Arromanches-les-Bains ou La Cité Internationale de la Tapisserie d’Aubusson, c’est Projectiles. Le Musée-Mémorial du terrorisme à Suresnes ou la Cité internationale de la langue française au Château de Villers-Cotterêts, aussi. Pour Carnac, ils ont imaginé ce bâtiment minéral carré qui sera de suite repérable en arrivant d’Auray. L’objectif du nouveau Musée de Carnac est d’offrir une expérience immersive autour des 370 000 objets composant les collections. Des espaces d’accueil lumineux puis, à l’inverse, une ambiance feutrée pour la partie muséographique. 3 200 m2 sur 4 niveaux pour un voyage à travers la période du néolithique et la construction des mégalithes.  

Budget prévisionnel 20 M€.

Ouverture prévue en 2027.