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Xavier Veilhan : “Si on ne bouge plus, on est mort”


Interview / Patrick Thibault * Photos / Stéphane Grangier/Canal+ Publié dans le magazine Kostar n°50 - avril-mai 2016

On connaît d’abord Xavier Veilhan pour ses sculptures à facettes que l’exposition à Versailles a particulièrement consacré. L’artiste qui utilise d’autres mediums a conçu un écrin pour l’œuvre Occam I de la compositrice Eliane Radigue.



D'où vient cette envie ou ce besoin de travailler en lien avec la musique ou les musiciens ?

Souvent la musique est une dimension qui manque à la forme visuelle que je pratique. C'est une manière d'y insuffler une énergie et une temporalité différente. L’impact et la rémanence du son et de la musique apportent souvent un aspect plus lyrique à l’œuvre visuelle.


À quoi le public doit-il s'attendre en découvrant Systema Occam ?

Le public qui connaît l’œuvre d’Eliane Radigue pourra s’attendre à une expérience assez extrême mais très belle dans sa radicalité. Pour ceux qui ne connaissent pas son œuvre, j’espère que le travail que j’ai fait autour de sa musique sera une manière de l’introduire et de lui apporter le contexte qui manque souvent. Sa musique est assez exigeante et nécessite une acoustique et un cadre particuliers, notamment une assistance en petit nombre, puisqu’elle doit être jouée directement sur un instrument non amplifié.


Votre art est pluridisciplinaire, est-ce à dire que c'est toujours l'interaction des disciplines qui vous motive ?

J’utilise très souvent des techniques différentes selon le projet. Il n’existe pas vraiment une interaction, hormis peut-être dans le cadre d’une exposition dans laquelle les œuvres sont de nature assez distincte. Mon approche de la pluridisciplinarité est dans ce sens très pragmatique. Je le compare souvent à un moyen de transport : il est très naturel pour moi de choisir tel ou tel support quand le projet initial, l’œuvre au stade conceptuel, se distingue du travail antérieur et implique du coup une autre manière de le réaliser.


“La solidité des choses n’est que superficielle et la réalité est un mouvement.”

Il semble que vos œuvres s'inscrivent toujours dans le mouvement, qu'il soit historique, temporel, physique, musical… Comment est-on un artiste en mouvement ?

C’est un peu comme dire qu’on est un artiste contemporain : on l’est par essence. Si on ne bouge plus, on est mort. Au niveau physique, nous ignorons trop souvent que tout ce qui nous entoure – les planètes, l’eau, l’air – est en mouvement, même notre propre corps. La solidité des choses n’est que superficielle et la réalité est un mouvement.


Vous avez travaillé avec les frères Bouroullec qui sont les invités de notre numéro 50, ne faites-vous pas un peu le même métier ?

Je suis devenu un ami après avoir été un admirateur de leur travail, qui est pour moi très juste, très permanent. Je suis aussi intéressé par leur mode de travail : ils réussissent malgré leur succès international à garder une proximité par rapport aux choix qu’ils font, aux objets qu’ils développent. Ce n’est pas forcément la proximité entre nous qui m’attire, même s’il y en a bien une : on se croise souvent sur des formes ou des façons d’aborder les choses. C’est au contraire notre distance qui suscite mon grand intérêt. Ils font un métier différent – même si parfois j’emploie des techniques communes au monde du design, de l’architecture et de l’art – et cette différence, cette bonne distance, me permet de mieux voir les choses. D’une certaine façon, ils développent une sorte de métaphore autour d’idées que nous avons en commun. Nos travaux sont des métaphores respectives les uns par rapport aux autres.


Systema Occam


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