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Festivals d'automne



Dossier réalisé par Matthieu Chauveau et Patrick Thibault Publié dans le magazine Kostar n°77 - octobre-novembre 2021



Ils nous ont tellement manqué que Kostar est ravi de proposer un dossier consacré aux festivals d’automne. Si certains auront des positionnements différents, ils reviennent tous avec l’urgence de provoquer la rencontre entre les artistes et le public, de partager des coups de cœur et retrouver le plaisir de l’émotion partagée. Musique, théâtre, danse, cinéma, science-fiction… c’est ouvert.


Le goût du risque

« Après ces longs mois de silence et d’opacité, j’ai eu envie d’une fête dionysiaque pour rallumer la lumière sur l’indispensable créativité des artistes », explique Thomas Jolly. La saison du Quai commence donc avec un temps fort, Le Grand-Ouest Festival, « pensé comme un précipité de la création contemporaine » et qui pourrait être amené à rayonner sur… le Grand Ouest. Danse, théâtre, cirque, musique, performances… 25 propositions souvent hybrides, inclassables et moins conventionnelles. Et 80 représentations sur 8 lieux différents. Si le festival n’est pas régionaliste, il n’en réunit pas moins de 11 artistes du Grand Ouest. Thomas Jolly avait d’abord pensé créer à Angers le Festival Danger. «Le risque traverse cette édition. On voit émerger une génération d’artistes qui font preuve de danger sur le fond et la forme, abordent des sujets qui questionnent. » Place à la création. Ian de Pauline Picot mis en scène par la Rennaise Flora Diguet évoque les mythologies musicales à travers la trajectoire fulgurante de Ian Curtis, le chanteur de Joy Division. Ivres, un travail baroque et luxuriant d’Ambre Caron traduit presque l’ivresse du propos. À l’Ouest de Bajour, Ravissement de Vanessa Bonnet, Viril, oratorio féministe ébouriffant de David Bobbée. La Trilogie des contes immoraux de Phia Ménard, John de Wajdi Mouawad mis en scène par Stanislas Nordey, un focus Marine Bachelot Nguyen, François Tanguy, et Maud Le Pladec en clôture.

Grand Ouest Festival, du 24 septembre au 16 octobre, Le Quai, Angers.


Elles sont de Rennes

Si certains festivals sont sortis affaiblis de la crise sanitaire, d’autres y ont vu leur pertinence renforcée. C’est le cas d’I’m from Rennes, attaché à la scène émergente locale. Et si le coup de pouce était salutaire avant la Covid, il l’est encore plus pour des artistes stoppés net dans leur élan depuis un an et demi… Pour cette 10e édition, I’m from Rennes ne change donc pas une recette qui marche. Il y ajoute cependant un détail qui fait toute la différence : l’application rigoureuse de la parité dans sa programmation défricheuse. Et ça tombe bien, les artistes qui nous emballent le plus sont toutes des filles. Le vendredi à la salle de la Cité, on vous conseille donc fortement la mi-folk mi-glam Vicky Veryno et le rejeton breton de PJ Harvey Hazel Anne. Le samedi Allo Mantis et Maison Carton, qui sont comme les deux faces d’une même pièce de pop lo-fi – l’une rêveuse, l’autre farceuse.

I’m from Rennes, du 19 au 26 septembre, Rennes.


Kill Billx

Ça nous est tous arrivé un jour : on marche tranquillement dans la rue et une voiture en mode tuning passe par là, nous assommant avec un morceau electro à la fois lisse et terriblement agressif. Pendant un quart de seconde, on se demande qui a pu bien commettre un tel méfait. Découvrir la prog de Panoramas, c’est mettre un nom sur cette musique : Billx, soit le pire (on l’espère), de ce qui peut se faire en hard-tech. On ne saurait pour autant réduire le festival morlaisien à cette faute de goût. Car sa force, c’est bien son éclectisme – au-delà de la bonne ambiance légendaire qui y règne. À la soirée du vendredi, on préfère donc celle du samedi, marquée par la présence de deux grandes dames de l’électro made in France (et qui plus est copines) : Rebeka Warrior au rayon techno aride et engagée, Maud Geffray dans une veine plus onirique. Une soirée à ne pas manquer, organisée comme la précédente dans le nouveau temple culturel morlaisien le Sew.

Festival Panoramas, du 24 au 26 septembre, Morlaix.


La vague parfaite

Baisers volés (François Truffaut, 1960), l’un des meilleurs films de la Nouvelle Vague ? Le débat est ouvert. Baisers volés (mini-festival, 2021), l’une des meilleures programmations de La Nouvelle Vague, la salle ? À n’en pas douter. Sur deux jours, la salle malouine présente la crème de la jeune scène française, sans viser à l’exhaustivité mais en faisant de vrais choix artistiques. Chaque soir, trois groupes se succèdent sur scène avec un vendredi clairement orienté groove et un samedi nettement plus “ chill”, comme pour se remettre de la veille (optez donc de préférence pour le pass deux jours). Quel groove ? Celui, acidulé et tubesque de L’Impératrice, mutant des foufous Quinzequinze et infatigable de la machine à danser Macadam Crocodile. Quel chill ? Celui ressenti à l’écoute de la pop éternelle de Rover, des mélopées automnales de November Ultra et du folk atmosphérique d’Elliott Armen (Malouin d’origine qui devrait vite faire parler de lui).

Baisers volés, les 24 et 25 septembre, La Nouvelle vague, Saint-Malo.


La grande bouffe

Sacro-sainte projection en salle vs visionnage en streaming ? Le Festival du film britannique de Dinard ne tranche pas en proposant une 32e édition à la fois sur son site historique et en ligne (ce qui est une manière de donner son avis). L’information étant passée, il est évident que, sans la mélancolie automnale de la plage de l’Écluse, Dinard perd de son charme. D’autant que l’événement se distingue par sa délicieuse ambiance so british dont l’affiche nous donne un parfait avant-goût : un couple aux visages masqués par les ingrédients emblématiques d’un english breakfast… De masque, on espère cependant que la présidente du jury, Bérénice Bejo, sera exemptée au moins pour les cérémonies d’ouverture et de clôture. Entre ces événements, une cinquantaine de films (de qualité mais accessibles : la marque Dinard) sont programmés ce qui, sur cinq jours, devrait donner du pain sur la planche aux festivaliers.

Festival du film britannique de Dinard, du 29 septembre au 3 octobre.


Eh bien, dansez maintenant !

Que se passe-t-il aujourd’hui dans les cultures électroniques au sens (très) large ? Le bien nommé festival Maintenant fait le point, tout en pensant fortement à demain. Car les concerts, expos et performances proposés dans une dizaine de lieux de la métropole rennaise ont ceci de particulier qu’ils marquent durablement. Envie de découvrir le dernier DJ electro à la mode ? Remettez Maintenant à plus tard. Ici, vous découvrirez surtout des excentriques. Par exemple un plasticien qui recrée un essaim d’abeilles avec des haut-parleurs suspendus en l’air (l’installation de Félix Blume, Hôtel Pasteur) ou un collectif qui réinvente une partition majeure de Steve Reich grâce à une scénographie novatrice (Drumming in Motion par l’ensemble Links à l’Opéra de Rennes le 6 octobre). Mais attention, avec le concert de la géniale Lucie Antunes (le 8 octobre à l’Antipode), vous comprendrez qu’il n’est pas non plus interdit de danser Maintenant.

Maintenant Festival, du 1er au 10 octobre, métropole rennaise.

L'Événement

Douzième édition pour un jeune festival qui s’est fait une place dans la jungle des rendez-vous cinéma. Le public aime sa convivialité et les artistes sont heureux de faire le voyage. Il y a aussi l’intelligence de la programmation et des choix audacieux qui permettent de voir des films différents et attachants. Pour cette édition 2021, on aura le plaisir de découvrir en première française L’Événement, Lion d’Or à la Mostra de Venise en présence de la réalisatrice Audrey Diwan. Avant-première aussi de Medusa (présenté cette année à la Quinzaine des réalisateurs) en présence de la réalisatrice Anita Rocha da Silveira, Suprêmes de Audrey Estrougo, en présence de l’équipe du film. Pour le jeune public, première française de Princesse Dragon de Jean-Jacques Denis et Anthony Roux. Exposition à l’espace d’art contemporain consacrée à Lorenzo Mattotti. Un festival ouvert sur le monde !

Festival International du Film de La Roche-sur-Yon, du 11 au 17 octobre.

Qu'est-ce que sera demain ?

Réfléchir au passé, décrypter le présent et anticiper l’avenir : tel est le crédo des Utopiales, le Festival International de science-fiction de Nantes. Thème de l’édition 2021, Transformations, décliné en quatre sous-thèmes : transitions, évolutions, adaptations et mutations. Des écrivains au rendez-vous (Céline Minard, Pierre Bordage, M.R. Carey…), des auteurs-illustrateurs de bande-dessinée (Alex Alice, Denis Bajram, Léa Murawiec…), des scientifiques (Jean-Paul Demoule, Blandine Comte, Joël Doré…). Des expositions (Le Château des étoiles d’Alex Alice, Goldorak) et une section cinéma très prisée avec son lot d’avant-premières internationales. Avec, comme toujours, une ambiance conviviale unique pour cette réunion de publics très différents.

Les Utopiales, du 29 octobre au 1er novembre, Cité des Congrès, Nantes.


Allumer le feu

Il y a bien sûr, comme chaque année, plusieurs têtes d’affiche grand public aux Indisciplinées (Yseult, Hervé…). Mais ne vous fiez pas à ces noms omniprésents dans les médias et loin d’être antipathiques soit dit en passant. C’est quand Les Indisciplinées malmènent les conventions qu’on les préfère. Par exemple celles de la chanson française avec Feu! Chatterton (13 novembre à Lanester), vrai grand groupe de rock indé sur scène, qui ajoute même une bonne touche d’electro depuis son acoquinement avec le géant Arnaud Rebotini. Mais aussi celles du rock, justement, avec Thurston Moore (11 novembre à l’Hydrophone), icône absolue de la scène indépendante américaine. L’échalas à l’allure d’éternel teenager (63 ans ? Impossible !) sera accompagné de son Group constitué de musiciens aux CV impressionnants, parmi lesquels l’ancien compère au sein de Sonic Youth, Steve Shelley (batterie) et Debbie Googe des mythiques My Bloody Valentine (basse).

Les Indisciplinées, du 4 au 13 novembre, Pays de Lorient.


Festival de créations

Imaginé comme un précipité du projet artistique, le Festival TNB reste ce temps fort où l’on découvre des spectacles différents. Formats hybrides, durées qui peuvent être plus courtes ou plus longues et toujours ce goût du risque qui éveille la curiosité. Arthur Nauzyciel y présentera enfin Mes frères, fable féministe, le spectacle que lui a écrit Pascal Rambert, créé à La Colline l’an passé. Pascal Rambert, lui, monte Dreamers, le spectacle choral interprété par les étudiants du TNB. Julie Duclos aborde, dans Kliniken, la question de la psychiatrie qui n’est pas forcément où on l’attend. Dispak/Dispac’h est une création de Patricia Allio sur le Tribunal Permanent des Peuples. Latifa Laâbissi renoue avec les codes de la veillée pour sa nouvelle pièce dansée, La Nuit tombe quand elle veut, création au CCNRB. Le Belge Guy Cassiers crée Antigone à Molenbeek & Tirésias et on y retrouve ses visions esthétiques et sonores fascinantes et envoûtantes. “Put your heart under your feet… and walk !” est la bouleversante performance de Steven Cohen offerte à son compagnon décédé. Suite de la programmation bientôt.

Festival TNB, du 9 au 27 novembre, Rennes Métropole.


Un certain underground

Et si 2021 était l’année idéale pour se mettre au Festival Invisible ? Sorti au printemps dernier, une BD nommée Underground (éditions Glénat) permet de faire sa propre culture en matière de musiques pas comme les autres, la spécialité maison. Le livre est justement co-signé Arnaud Le Gouëfflec, directeur artistique d’Invisible, et donne lieu à une petite expo chez le disquaire Bad Seeds pendant le festival. L’occasion de se familiariser avec des outsiders légendaires qui, de Daniel Johnston aux Cramps, ont certainement influencé les artistes programmés. Au rayon bricolage pop, impossible de passer à côté du déjà culte Rouge Gorge (16 novembre, Espace Vauban), qui mélange comme personne une new-wave minimaliste à des rythmes vaguement bossa. Au rayon électricité, le concert des mythiques A Certain Ratio (20 novembre à la Carène), qui depuis plus de 40 ans réconcilient Joy Division et James Brown, est évidemment un must see.

Festival Invisible, du 16 au 20 novembre, Brest.



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