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Liverpool, par Franck Gérard




Depuis le temps que nous lui courons après, le photographe Franck Gérard, représenté par la galerie Mélanie Rio, a fini par craquer. Du coup, l’ancien des Beaux-Arts de Nantes qui revient tout juste de Paris Photo, première foire de photographie au monde, vous offre une visite de Liverpool comme vous ne l’avez jamais vue. Merci pour le guide.


Liverpool, a hard day’s night.

J’aime profondément cette île, l’Angleterre et particulièrement Leeds, Manchester et Liverpool. Ce jour d’août où je suis arrivé dans le centre-ville de Liverpool a été un grand bonheur. Je ne connaissais que de nom cette ville. Elle a pour point commun avec Nantes d’avoir été l'un des plus grands ports négriers d’Europe, mais cela est le passé.

La première chose que je fais, lorsque j’arrive dans une ville inconnue, c’est acheter une carte.

Je suis ici pour une quinzaine de jours. Je commence toujours par arpenter le centre-ville puis je choisis une direction, au hasard, et dérive. Je me retrouve là pour faire des images, invité par Polly M.

Je suis ici un touriste mais ne me considère pas comme tel. Je ne suis que peu allé dans des musées ou monuments, j’ai préféré aller dans des pubs, des gares, des rues, des quartiers, des magasins, des parcs, des cimetières…

Je suis ici pour produire des images comme à mon habitude. Je me retrouve dans un immense appartement avec vue sur la mer au nord de Liverpool, à Waterloo. Lorsque je regarde de la fenêtre de la cuisine, j’aperçois au loin dans un jardin, la cabine téléphonique du Dr Who ; je souris, je suis bien en Angleterre.


Là-bas, on parle le « scouze », un anglais à l’accent radical et qui mange les syllabes.

Après m’être promené, je suis allé dans un pub et inévitablement en tant que « Froggy » j’y ai fait des rencontres. Au début, je ne comprenais pas vraiment leur anglais ; là-bas, on parle le « scouze », un anglais à l’accent radical et qui mange les syllabes : Comprenez « Take me to the ozzy » comme « Take me to the hospital » ; si la personne tombe sur un touriste, il aura tout le temps de mourir, je pense ; un peu d’humour anglais ne fait pas de mal.

Donc j’ai pris un « bevy » (comprenez un drink) et j’ai parlé toute la soirée avec les liverpudliens qui m’ont raconté leurs vies et leurs villes. J’ai sorti la carte et il me l’ont annotée.

Je me suis fini dans un « fish and chips » et quel plaisir. n Il y a une poésie inhérente à chaque ville, une « musique » et dans celle-ci je me suis retrouvé happé. Le berceau des Beatles, Liverpool, et dire que je l’ignorais…

J’ai donc commencé à traverser la ville de long en large commençant par le centre-ville. On peut y voir de magnifiques architectures, mais aussi des « verrues » à commencer par un gigantesque espace commercial nommé le « Liverpool One ». Si vous allez à Liverpool pour faire vos courses, pas de problème, vous trouverez tout ce que vous voulez. Ce que j’ai toujours trouvé étrange en Angleterre c’est l’opulence des centres, en terme de commerces, de galeries marchandes, alors que dès que l’on s’éloigne un tant soi peu de ces endroits, la vie réelle reprend le dessus. Il y a quelque chose de l’ordre de la fiction dans ces centres villes du nord de l’Angleterre.

Les premiers « vrais » quartiers que j’ai traversés se nomment Everton et Anfield. Dès que l’on s’éloigne du centre, on sent la pauvreté et la dureté de la vie. Ce qu’il y a de plus impressionnant, c’est le nombre de maisons et de bâtiments abandonnés, dont certains magnifiques comme d’anciennes casernes de pompiers ou la bibliothèque d’Everton par exemple. Lorsque l’on commence à marcher et que la ville se déplie devant nous, on peut comprendre ce qu’est réellement cet espace ; c’est cela qui m’intéresse, à travers les rues, les architectures et surtout les habitants qui la peuplent.


Dans le quartier d’Anfield c’est terrifiant : des rues entières sont condamnées

Dans le quartier d’Anfield c’est terrifiant : des rues entières sont condamnées, les fenêtres des maisons bardées de métal dans l’attente d’une hypothétique construction de stade qui n’aboutit pas. En face, le premier stade, le « Anfield football stadium », siège du FC Liverpool est comme une soucoupe volante qui aurait atterri au sein de ce quartier. Ici le football est une religion comme au Brésil et la « religion engendre du pouvoir » ! Peu importe de « virer » les gens et de détruire leurs maisons ; l’argent et le pouvoir feront le ménage !

Dans ces rues abandonnés, je me suis fait arrêter par la police ; ils m’ont juste dit de faire attention à moi. Mais sinon, ce sont des quartiers populaires riches de vie où les gens sont aimables, de mon point de vue.

Bref, j’ai traversé de nombreux quartiers comme celui de « Toxteth », le quartier noir et musulman. En Angleterre, les clivages et les communautés sont beaucoup plus forts qu’en France. C’est toujours étonnant de traverser un quartier où l’on se retrouve en situation de « minorité » et où l’on est « regardé » car personne ne fait cela. J’ai discuté avec des enfants qui jouaient au foot…

Il y a à Liverpool une profusion de parcs tous plus magnifiques les uns que les autres ; j’aime aussi beaucoup toutes ces couleurs, la couleur de la brique particulièrement, tous ces rouges et ces oranges qui se côtoient ; en photographie c’est extrêmement graphique.

Le seul quartier où je suis allé accompagné est « Norris Green » où des gangs sévissent ; j’ai rencontré un homme formidable qui s’occupe d’un centre pour les enfants et les ados ; c’est un essai d’éloignement des gangs et cet endroit est riche d’activité en tout genre. Ce lieu a été totalement rénové récemment grâce à une émission de téléréalité, et pour une fois, j’ai trouvé un sens à ces émissions. C’est comme la culture en Angleterre, ils ont eu l’intelligence de la faire financer en grande partie par la loterie nationale ; à chaque fois que l’on achète un ticket, un pourcentage va à l’art ! Je dis bravo !


Des myriades de jeunes filles ou femmes plus âgées viennent dans les pubs faire la fête avec des chaussures à talons des plus hauts et des plus fantaisistes, des « Mary Quant » de folie et des maquillages à faire pâlir les geishas !

Et puis, je me devais de vous en parler, il y a la fameuse « Mathew street » et le mythique « Cavern Club » où les Beatles ont joué maintes fois. Je vous conseille d’y aller un soir de week-end, c’est socialement hallucinant. Des myriades de jeunes filles ou femmes plus âgées viennent dans les pubs faire la fête avec des chaussures à talons des plus hauts et des plus fantaisistes, des « Mary Quant » de folie et des maquillages à faire pâlir les geishas !

La seule chose que je pourrais vous dire, c’est que j’aime profondément cette ville et qu’elle me manque ! Allez-y et faites votre propre « Liverpool » car à l’instar de la psychogéographie, chaque personne trace ses propres chemins dans la ville.


Franck Gérard travaille actuellement sur Manifester en l’État, commande publique de photographie du ministère de la Culture et de la Communication – CNAP Centre national des arts plastiques. La série a été réalisée à Marseille.

De leur temps (4), exposition collective, jusqu’au 5 janvier, Hab Galerie, Nantes.

Jusqu’à fin 2013, résidence au CHU de Nantes au service de chirurgie maxillo-faciale.

À partir de janvier, résidence au Domaine de la Garenne-Lemot, Gétigné. Exposition personnelle en juillet.

Exposition personnelle, vernissage fin janvier, Galerie Mélanie Rio, Nantes.









Entre Ansfield et Penny Lane

Energy and creativity : pas besoin de traduire pour comprendre que la ville, frappée par le déclin industriel des années 70, a su rebondir. Liverpool n’est d’ailleurs pas sans rappeler Nantes. Elle aussi a bâti sa fortune, au XVIIIe siècle, sur le commerce des esclaves. Mais on y parle plus volontiers aujourd’hui de football ou des Beatles…


Y aller

En fonction des saisons, prenez un vol pour Liverpool ou Manchester.


S'y loger

Ville port, capitale touristique et culturelle, Liverpool dispose d’un vaste parc hôtelier. Pour profiter de la ville à pied,optez pour un hôtel ou B&B pas trop éloignée de l’Albert Dock ou des bords de la Mersey : à défaut du kitschissime Titanic Boat (300€/nuit), on trouve des chambres à partir de 62€ au Dolby hôtel (sur Chanalor st.).


Circuit Kostar

Toutes proportions gardées, Liverpool et Manchester, c’est Nantes et Rennes. Si les villes sont plus proches, les supporters du LFC et de MU s’apprécient tout aussi cordialement que ceux des jaunes et verts et des rouges et noirs. Les amateurs sauront retrouver le stade historique d’Anfield road aussi sûrement que les nostalgiques des quatre garçons dans le vent feront un tour du côté de Penny Lane et du Cavern Club.

Un tour du côté de l’Albert Dock permet de prendre la mesure de ce qui a été fait pour redonner le moral à une ville secouée par la désindustrialisation. Cet imposant ensemble architectural, restauré et réaménagé, abrite aujourd’hui une Tate gallery (à ne pas manquer), ainsi que des restaurants et boutiques… Capitale européenne de la culture (en 2008), la ville compte de nombreux musées dont la Walker gallery et l’International Slavery Museum.

En remontant des docks vers l’université, on traverse Chinatown (la ville possède le plus ancien quartier chinois du pays) et le quartier branché d’Hope street. Avant de s’éclater à l’East village Arts club (qui accueillera The Fly awards en 2014), on peut se restaurer au Host qui propose une cuisine fusion d’inspiration asiatique. Prévoyez une escapade à Crosby Beach pour découvrir Another place, l’impressionnante et émouvante installation de sculptures dans la mer d’Antony Gormley.

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