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Sarah Mainguy, cuisine sauvage et urbaine



Interview / Laurence Goubet * Photos / Kristo pour Kostar Publié dans le magazine Kostar n°89 - février-mars 2024


Finaliste remarquée de l’émission Top Chef en 2021, avec la complicité de son compagnon, Damien Crémois, la Cheffe Sarah Mainguy ouvrira courant février sa deuxième adresse nantaise, Freia, au concept totalement inédit. Ce restaurant gastronomique situé dans une serre au 6e étage d’un parking se veut l’aboutissement du travail engagé chez Vacarme où les produits, cultivés ou sauvages, sont sublimés par une cuisine intuitive, particulièrement savoureuse et créative.


Nous vous retrouvons 3 ans après Top Chef, à l’aube de l’ouverture de votre deuxième restaurant. Que s’est-il passé durant ces 3 années ?   

3 années de double gestation ! Parce que j’ai eu un enfant mais aussi parce que l’ouverture de cette seconde adresse a pris plus de temps que prévu. J’avais l’idée d’une petite adresse de quartier. Au final, ce sera un jardin urbain sur un toit. J’ai accepté de ne pas voir petit et de me lancer dans un projet de cette envergure.


Comment est né le projet de Freia ?   

Le projet est né du lieu. J’ai visité beaucoup de restaurants mais rien ne me convenait. J’ai donc contacté la mairie de Nantes en indiquant que j’avais envie d’un lieu différent. Je savais que Nantes avait cette qualité de vouloir réinventer des espaces. Quand ils nous ont présenté cet endroit, avec une serre et un extérieur où il était possible de cultiver des choses, au 6e étage d’un parking, donnant l’impression d’avoir la tête dans le ciel… Ça a été le coup de cœur immédiat pour Damien et moi-même.


Pouvez-vous nous présenter ce que sera Freia ?   

Un restaurant gastronomique (bien que je n’aime pas trop ce terme), qui s’inscrit dans le courant des “Garden to Table”. Une auberge urbaine avec un jardin urbain. Le repas se passera entre l’intérieur, autour du feu en hiver, et l’extérieur. Dans un premier temps, le restaurant sera uniquement ouvert le soir avec un menu unique en 8 temps. Nous n’avons pas encore réussi à trouver un format idéal pour que ce soit aussi agréable au déjeuner qu’au dîner. Aux beaux jours, je sais que je vais souhaiter que le restaurant vive aussi le midi et que nos clients profitent au maximum de la beauté du jardin.


“J'avais l'idée d'une petite adresse de quartier. Au final, ce sera un jardin urbain sur un toit.”

Et dans l’assiette, on trouvera quoi ?  

Des légumes sublimés mais pas dénaturés ! Beaucoup de végétal mais pas que. Il y aura aussi de la viande, des coquillages, des poissons, et même des poissons d’eau douce. L’idée c'est que l’animal soit là mais ne soit pas l’élément principal. Je ne m’interdis rien. Évidemment, il s’agit avant tout de travailler la saison. 


Et dans le verre ?   

Des vins axés nature, bio, biodynamie en grande majorité, avec une parité homme/femme souhaitée, mais aussi du cidre, de la bière… Nous proposerons un accord sans alcool avec des infusions, des sirops, des schrubs… issus de notre jardin de plantes aromatiques. 


Que souhaitez-vous faire vivre aux gourmets qui viendront chez Freia ? 

J’espère faire en sorte que nos clients déconnectent de leur quotidien. Le fait de monter en hauteur va nous le permettre. J’aimerais qu’ils aient l’impression d’être hors du temps tout en étant en ville et acceptent de partir en balade avec nous, dans notre jardin, mais aussi chez nos producteurs. 


Quels autres lieux vous ont inspirée ?   

Je peux citer le restaurant Choux à Amsterdam, Amass, ou encore Stedsans à Copenhague. Il y a aussi le livre The Garden Chef (aux éditions Phaidon) qui m’a énormément inspirée et donnée envie d’avoir un peu les mains dans la terre.


C’est donc vous qui allez cultiver le jardin ?   

Oui mais pas seule. Alice Ménard, notre maraîchère, est l’élément indispensable de ce nouveau restaurant. C’est elle qui a fait la mise en culture des jardins extérieurs et intérieurs, qui les entretient et qui va nous apprendre à les entretenir.


”Des légumes sublimés mais pas dénaturés !”

Qui vous accompagnera en salle et en cuisine pour l’ouverture du restaurant ?   

On a réussi à constituer une équipe géniale. Il y a notamment le sommelier Jérôme Boulier qui a travaillé pendant un peu plus de 10 ans en Angleterre. En cuisine, il y aura Capucine qui a travaillé chez Louise Bourrat au Portugal, Daniel qui vient du Brésil, Romain qui a travaillé chez Saturne à Paris, mais aussi en Roumanie et au Canada. Romain est boulanger et cuisinier. Le travail du pain et de la pâte sera aussi un des fils conducteurs du menu. On continuera cependant de se fournir auprès de la Maison Arlot Cheng en parallèle.


Outre Alice Ménard, allez-vous travailler avec d’autres producteurs du terroir nantais ?   

Je ne voulais pas avoir une multitude de producteurs. L’idée, c'est de s’adapter à eux, à leur production. C’est pour cela que je veux travailler avec un seul maraîcher, un seul éleveur de vache, de mouton… Le but est d’avoir une réelle compréhension de leur travail afin de pouvoir le relater à nos clients. On s’est entouré de Benoit Rolland, éleveur de vaches nantaises, des Jardins de la Mer pour les algues, La Maison de la Pomme pour les fruits, Les Ruchers du Pays blanc pour le miel, Les Pigeons de Pornic… et on travaillera avec le Kiosque Paysan pour favoriser au maximum un approvisionnement local et de qualité.


Il y a aussi une céramiste nantaise, Yulie Echavídre. La vaisselle sera donc également locale?   

Encore mieux, sur une des assiettes qu’elle confectionne, la terre est locale. Elle est aussi en train de concocter des assiettes avec des impressions végétales pour lesquelles les plantes utilisées viennent du jardin de Freia et du potager d’Alice Ménard. Nous voulons travailler avec des artisans locaux engagés. On peut citer Les Batonnets, notre entreprise de menuiserie et mon amie Alizée (Alilab) qui est en train de nous faire toutes les serviettes de table à partir de tissus upcyclés. Et tous nos meubles sont de seconde main.


D’où vient le nom Freia ? 

C’est un nom que j’aurai pu donner à ma fille. C’est une déesse de la fécondité dans la mythologie scandinave, ce qui fait sens vis-à-vis du jardin et fait écho à des influences qui nous sont chères, Damien étant finlandais.


“L'Étoile verte aurait beaucoup de sens pour nous.”

Rêvez-vous d’une récompense pour cette nouvelle adresse ? 

L’étoile verte aurait beaucoup de sens pour nous, car on a essayé de réfléchir à tout pour avoir un restaurant le plus durable et avec le plus faible impact environnemental possible. Nous allons continuer à être au maximum dans le zéro déchet, grâce à la fermentation, la déshydratation, des macérations ou par les infusions dans nos boissons sans alcool… et en compostant les restes dans notre jardin.


Comment allez-vous répartir votre activité entre Vacarme et Freia ? 

Damien va rester principalement sur Vacarme et moi sur Freia. J’ai recruté une cheffe chez Vacarme, Naila qui, après avoir été notre sous-cheffe, m’a remplacée en novembre.


Depuis les confinements, vous avez fait évoluer votre organisation du travail afin de fidéliser vos talents. Comment ça se traduit concrètement ?   

Nous avons arrêté les coupures. Toutes les équipes font 39 heures par semaine et toutes les heures supplémentaires sont payées. Il est aussi important de dire qu’ils peuvent faire leur travail dans ce temps imparti. À Vacarme, nous avons un roulement avec une équipe du matin et une équipe du soir qui alternent. Nous avons aussi choisi de n’avoir à Freia que de la cuisson électrique pour offrir un meilleur confort de travail aux équipes. On veille à avoir une vie d’équipe, à donner des petits plus, comme l’accès à des paniers de légumes pris en charge à 50 %.


Avez-vous déjà d’autres projets en tête pour les années à venir ?   

Là, j’ai la tête dans Freia. Mais, ça arrivera, je le sais… Je prépare un livre avec Hachette sur la cueillette avec la photographe nantaise Evaine Merle. Faute de temps, j’ai malheureusement dû en repousser la sortie à l’automne 2025.  


Freia, 22 Bd de Berlin, Nantes.

Vacarme, 5 Rue des Bons Français, Nantes.




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