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Arles, au-delà des clichés


Luma Arles © Iwan Baan

Texte / Vincent Braud


Voir ce qu’on ne veut pas voir. Les photographes ont ce talent de bousculer notre regard. Et c’est Arles qui, chaque été, les accueille. Cette année, clin d’œil à l’histoire des Rencontres, c’est l’avant-garde féministe des années 70 qui a la part belle. Et c’est une femme, Mitch Epstein, qui signe l’affiche de l’édition 2022. Arles ? De quoi en prendre plein les yeux.


D’un côté, les arènes, construites au premier siècle de notre ère, de l’autre, une étrange tour, de verre et de métal qui n’en finit pas de faire parler d’elle, signée Franck Gehry, inaugurée en juin 2021. Arles, décidément, donne du relief à ce plat pays du Sud qu’est la Camargue. Arles, c’est bien sûr ces prestigieux vestiges du passé qui valent à la ville son inscription au patrimoine mondial de l’humanité en 1981. Les arènes et le théâtre antique ont toujours fière allure et font le bonheur de touristes en mal de selfies. Mais c’est aussi ce nouvel espace d’exposition, imaginé par l’artiste sud-coréen Lee Ufan dans le prestigieux Hôtel Vernon, inauguré ce printemps.

Les Alpilles et les Baux-de-Provence d’un côté, la Camargue et les Saintes-Maries-de-la-Mer de l’autre : Arles doit au fleuve qui l’arrose ses vicissitudes et sa richesse. On s’y est castagné très longtemps. Cette ville – qui semble assoupie sous le soleil estival – est dotée d’un sacré caractère.


La culture comme moteur

Au siècle dernier, Arles abritait un impressionnant parc d’ateliers. C’est là que se construisaient, s’assemblaient et se réparaient les locomotives des chemins de fer français. Le déclin progressif des activités, à partir des années 50, amène à la fermeture définitive du parc en 1984. Un drame au plan local : un symbole disparaissait.

C’est de la culture que viendra la renaissance du Parc des Ateliers. Au début des années 2000, Les Rencontres d’Arles s’y déploient dans de nouveaux espaces d’exposition. Le festival Les Suds y organise également des concerts. La friche industrielle revit enfin. La rénovation d’un immense atelier est confiée au cabinet Moatti & Rivière et, en 2007, est inaugurée La grande halle, espace dédiée à la création multimédia et au numérique. En 2021, Maja Hoffmann y installe sa fondation et Luma ouvre ses portes. Et en 2022, c’est Lee Ufan qui s’installe au cœur de la ville historique dans cet hôtel particulier, réaménagé par Tadao Ando.


Le choc de la photo

Arles, c’est à la fois le poids des mots, avec les éditions Actes Sud, et le choc des photos avec les célèbres Rencontres. C’est en effet au 8e art que la ville doit sa réputation internationale. Depuis plus de 50 ans, la ville voit accourir une foule de touristes pas comme les autres : près de 100 000 mordus de la photo viennent désormais du monde entier, chaque été, se régaler de rétrospectives et d’expos. Personne n’imaginait un tel développement, lors de la première édition des Rencontres en 1970. On y découvre alors le travail de Brassaï puis celui de Doisneau, Cartier-Bresson, Man Ray, Lisette Model, Doug Stewart, Gordon Bennett… C’est encore ici qu’on expose, en 1988 et pour une “première” à l’étranger, la photographie chinoise. C’est là également que Magnum fête ses 60 ans en 2007…

Les Rencontres, c’est l’occasion de tout un périple en ville et au-delà. Arles, c’est l’ancien archevêché, le cloître Saint-Trophime, le couvent des Cordeliers, l’Espace Van Gogh ou, un peu plus loin, la superbe abbaye de Montmajour, mais aussi son Monoprix (mais oui…), son Parc des Ateliers sans oublier l’École de la photographie, inaugurée en 2019, la Fondation Luma et son parc paysager. Arles ? Une ville d’hier solidement ancrée dans ce XXIe siècle.


Photos © Vincent Braud



Arles 2022 du 4 juillet au 25 septembre.

À voir (choix forcément partiel et arbitraire) : Une avant-garde féministe, première expo en France de la Collection Verbund, Frida Orupabo, Sandra Brewster à la Mécanique générale ; Un monde à guérir, 160 ans de photos à travers les collections de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge au Palais de l’Archevêché ; Lee Miller et Romain Urhausen à la Fondation Van Gogh ; Céleste Leeuwenburg, Akeem Smith, Mika Perling… à l’église des Frères Prêcheurs ; James Barnor à Luma, Lukas Hoffmann à Monoprix, Mitch Epstein à l’abbaye de Montmajour…

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