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Carte blanche : “Le bouquet”, par Justin Weiler



Texte / Patrick Thibault * Visuels Justin Weiler Publié dans le magazine Kostar n°54 - février-mars 2017


«Comment continuer à peindre des fleurs aujourd’hui ? Comment revisiter le bouquet de fleurs, allant de Brueguel à Gasiorowski?» Autant de questions posées par Justin Weiler dans une œuvre en train de fleurir et qui, à terme, réunira 81 formats pour arriver à une dimension de 3,60 mètres par 2,25.

Lorsqu’il est en entré aux Beaux-Arts, Justin Weiler détestait la peinture. « J’y suis rentré en grand naïf, dans une posture d’ado qui faisait du dessin et de la performance mais je me suis vite rendu compte qu’on était nombreux à faire ça. » Il choisit donc la peinture en réaction, sans deviner à quel point elle l’obsèdera. D’emblée, il embrasse les questions qui touchent à la peinture au XXIe siècle et met en place un système de contraintes : supprimer une couleur de sa palette, jouer avec la reprise de tableaux de grands maîtres en se les réappropriant. Ou bien ne traiter qu’un seul sujet.


“Pour moi, ça n’est ni de la peinture, ni de la sculpture, ni du dessin.”

Car il y a quelque chose qui relève de l’obsession, de l’accumulation, « de la saturation aussi » dans l’œuvre de Justin Weiler. Il y a d’abord les plantes grasses, des yuccas qui finiront par être en vitrine et qu’il reproduit à l’infini sans jamais en avoir fait le tour. Un peu plus tard, il passe au lavis. « Pour moi, ça n’est ni de la peinture, ni de la sculpture, ni du dessin. C’est une technique hybride que je rapproche néanmoins de la sculpture sur marbre. »

Même si ça n’est pas la même obsession, au lavis, il y a la série des stores. D’abord des rideaux de fers criblés de balles au Liban. Les motifs des lignes horizontales sont soulignés par une lumière zénithale. « L’opposition formelle entre la radicalité des stores et la sensibilité du végétal se rejoignent. » Les obsessions se conjuguent et le jeune lauréat du prix des arts visuels de la Ville de Nantes travaille en parallèle sur son bouquet, toujours au lavis.

« Comment peut-on continuer à peindre un bouquet de fleurs sachant que tous les peintres du dimanche font ça ? Que Delacroix et Bruegel ont fait ça ? » La réponse est dans le fil conducteur de sa production : « quelque chose qui touche à la condition humaine et à la question des vanités. Il s’agit d’un bouquet en train de faner. » Un travail au long cours, au sol pour chacune des 81 parties du tableau final. Qu’importe que ce soit trop grand, trop cher : «Le fait de jamais les voir finis me donne envie de les voir plus grands.»




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