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Annabelle Sergent : près des yeux, près du cœur


Texte / Fédelm Cheguillaume * Photo / Delphine Perrin Publié dans le magazine Kostar n°64 - février-mars 2019

Auteure, dramaturge et interprète de ses propres textes, Annabelle Sergent est sur tous les fronts lorsqu’il s’agit de défendre des sujets brûlants. Artiste hyperactive et engagée, l’Angevine se distingue aussi par sa volonté de toucher tous les publics, soucieuse de ne laisser ni les défavorisés, ni les écorchés, ni les plus jeunes de côté.

Son nouveau spectacle, Waynak, ne déroge pas à la règle et propose d’entrevoir le monde à travers le regard de deux adolescents, dont l’un porte la mémoire de l’exil. Lili est née en France, quand Naji vient d’un pays en guerre. Dans un échange qui émerge comme une partition, tous deux se découvrent, souvenir après souvenir. Pour dresser ces portraits, « l’écriture s’est nourrie d’immersions auprès d’adolescents primo- arrivants, d’auteurs exilés, de journalistes, de documentaires ». Si elle veut avoir un impact, la fiction doit beaucoup au réel. « En 2015, j’ai été très touchée par les attentats. » Ce choc lui donne « la conscience aiguë que notre société occidentale entre dans une nouvelle ère ». Une ère où la redécouverte de l’autre devient nécessité, si l’on veut éviter de se faire happer par l’angoisse.

En sous-texte, la pièce pointe le manque de communication. Or, la parole est primordiale car « celui qui est exilé l’est de son pays mais aussi de sa langue maternelle ». Annabelle Sergent a fait le choix de traduire certains passages du texte en arabe syro-libanais, construisant les dialogues comme autant de charges poétiques.


« Le théâtre est le lieu où les mots et les chiffres circulent, passent les frontières ».

L’esthétique minimaliste, essentielle, laissant au langage toute sa place, fait le caractère unique des créations d’Annabelle Sergent. Ici, elle se traduit physiquement par la présence « d’un ponton noir, posé sur un sol noir dont on ne sait si c’est une grève ou un terrain-vague… » Espace entre deux mondes, terminus ultime, le théâtre est pour elle le lieu où « les mots et les chiffres circulent, passent les frontières ». La metteure en scène espère une fois de plus montrer que le spectacle jeune public – dont elle se réclame – « peut porter des questions fortes, à résonance sociale ». Saluée par un Molière en 2011 dans cette catégorie, la tournée de Waynak s’annonce déjà comme une belle récompense !


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