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Delphine Deloget, l’âme de Brest sur les écrans



Interview / Matthieu Chauveau * Photo / Rien à perdre © Curiosa Films Publié dans le magazine Kostar n°88 - décembre 2023-janvier 2024



Après plusieurs documentaires auréolés de prix (dont le Albert Londres pour Voyage en Barbarie en 2015), Delphine Deloget signe sa première fiction avec Rien à Perdre. Un film à la tonalité sociale emmené par une impressionnante Virginie Efira, en mère légèrement défaillante qui se retrouve séparée de son enfant. Le lieu du drame : Brest. Rencontre avec la réalisatrice d’origine bretonne.


On vous connaît comme documentariste. Pourquoi avoir choisi la fiction pour aborder le thème du placement d’un enfant par les services sociaux ?

Même dans mes documentaires, j’ai besoin que les personnages soient plus forts que le sujet. Et là, le sujet était tellement énorme, que j’avais peur de me perdre. Il y avait aussi une question d’ordre éthique. J’aurais eu du mal à filmer les personnes dans leur fragilité, eu peur de les mettre en situation de porte à faux. Quand on tient la caméra dans le documentaire, on a du pouvoir. Dans la fiction, il y a au contraire le plaisir de mettre ses personnages au pied du mur, de ne pas être tout le temps moral vis-à-vis d’eux, de les mettre face à leurs contradictions. Ce dont je ne me serais pas sentie capable dans un documentaire.


“Je cherchais quelque chose qui soit un peu fou et représentatif des ambiances festives bretonnes”

Pourquoi Brest ?

Je suis née à Paimpol dans les Côtes-d'Armor et j’ai fait mes études à Rennes. Je n’ai jamais vécu à Brest. J’avais besoin d’un territoire que je ne connaisse pas si bien, tout en y ayant passé un peu de temps. En l’occurrence, quelques soirées (sourire). Et je ne voulais pas filmer la province comme un désert, avec des gens qui n’auraient pas leur propre culture. Là, c’est la musique, donc Brest m’intéressait en tant que ville dynamique, jeune, où tout le monde se croise. Une ville qui est aussi géographiquement à part, parce qu’elle est au bout. J’avais une vision un peu cinématographique de Brest, sans vouloir la connaître trop non plus, pour ne pas rentrer dans des automatismes.


Votre film, plutôt sombre, contient aussi des éléments fantaisistes, comme cette poule qui s’invite dans une boîte de nuit…

Je cherchais quelque chose qui soit un peu fou et représentatif des ambiances festives bretonnes que j’ai pu vivre quand j’étais étudiante. Je me demandais : qu’est-ce qui pourrait arriver ? Une bagarre ? Déjà vu… Et j’ai pensé à la poule. Mais comme je viens du documentaire, tout cela est quand même alimenté par des histoires brestoises que j’ai lues. Par exemple, celle d’un homme qui se promenait avec une chèvre et qui allait au cinéma avec elle. Ces histoires prêtent à sourire mais elles racontent aussi une certaine vie, avec des choses qui peuvent être plus tristes et liées à la précarité. Mais cette poule, c’est peut-être aussi un peu la mère poule, pour faire le lien avec le personnage que joue Virginie Efira…


Rien à Perdre, un film de Delphine Deloget, avec Virginie Efira, Félix Lefebvre et Arieh Worthalter. Sortie le 22 novembre 2023.

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